Evian Doc Fest
Retour sur une séance de la première édition de ce festival de film documentaire.
Hé oui! Le Silencio Club Ciné aime la fiction par dessus tout, mais quand un festival ouvre sa première, même de documentaires, il est curieux de voir ses frères!
Je suis allée à la deuxième séance de Evian Doc Fest , Festival International du film documentaire d'Evian, première édition. C'est Le Cinéma Royal, notre cinéma de prédilection (un mois sur deux! 😉), qui a accueilli cet événement, avec chaleur et simplicité, bonne humeur et convivialité.
Orchestré par Whipped Sea et CAProd, respectivement représentés par Ghislaine Couvillat et Samuel Maion Fontana, (organisateur du premier Evian Doc Fest), le programme de cette soirée mettait l'accent sur le lien de l'Humain à la Nature.
Deux films très différents par leur forme.
Lignes de Vie, de Benjamin Bireau (26mn)
Portrait d'un freerider professionnel Manu Bonniot.
Ce documentaire est composé d'une série de 5 courts-métrages montés bout à bout. Un portrait du free rider Manu Bonniot qui apprivoise son diabète pour pouvoir continuer de skier, seul sur des pans vierges de toute trace humaine, et de créer de nouvelles lignes permettant de fendre ces paysages par des voies jamais empruntées.
Son but ultime est de tracer une ligne sur le Pic du Midi. Un film sur la passion profonde qui permet tous les dépassements.
Ce document est conçu sur une trame classique, alternant entretiens journalistiques et prises de vue de décors majestueux que Manu Bonniot explore avec aisance et risques. Un scénario adapté au rythme des aléas d'un quotidien peu contrôlable qui permettent au film des rebondissements imprévus par la production, le réalisateur, et Manu Bonniot lui-même. Ce qui devait être le parcours d'un skieur prêt à conjuguer avec sa maladie pour atteindre son but, devient celui d'un homme guidé par le besoin de repousser ses limites, toujours plus loin.
La quête du sauvage , de Jean-Charles Granjon (76 mn)
Long-métrage documentaire d'une toute autre sorte, le titre ne cache pas son objet.
Morgan Bourc'his est un apnéiste de très haut niveau pour qui la Méditerranée n'a (presque) plus de secrets. Mais saturé des traces de pollution humaine qu'il y recueille, il part explorer la Mer de Norvège, en quête de vie sauvage, et de nature originelle.
Ecrit comme un carnet de voyage, comme le journal intime de Morgan Bourc'his, il est bercé par une voix off à la première personne sur des images naviguant entre réalisme, surréalisme, et imaginaire. mais cette voix n'est pas que celle de "l'homme-poisson", qui apparait parfois dans une combinaison fine et argentée pour illustrer la métaphore. On le comprend en entendant le réalisateur parler de son film. Cette quête du sauvage est la sienne, et il est parvenu à lui donner corps par celui de Morgan.
"La quête du sauvage" est un parcours fantasmatique. C'est un documentaire sur la nécessité de reconnecter l'humain à la nature. Mais c'est aussi un documentaire sur la perception profonde d'un personnage qui a pris place dans ces eaux comme si lui-même en était issu.
Une dimension onirique s'en dégage.
Pour lui donner forme, le langage cinématographique est riche. Jean-Charles Granjon choisit l'animation pour nous conduire dans les légendes samies. Séquence magnifique de poésie! Il utilise des plans filmés en d'autres températures pour signifier l'aisance du nageur acquise. Il joue des jeux de lumière sous-marine et boréale, des lenteurs des mouvements portés par les flots... pour magnifier l'univers marin.
Et il ponctue son voyage initiatique de rencontres insolites avec un peuple rare et mystérieux qui se dévoile peu à peu, comme il dévoile celui des orques et des baleines.
Le réel a besoin parfois d'être traduit par l'irréel.
Où est le documentaire? Où est la fiction?
Au cinéma je crois, dans chaque réalisation!